Critique – Mécanique de la chute – Seth Greenland – Liana Levi
Jay Gladstone, juif à la cinquantaine bien avancée, est un modèle de réussite sociale qui a su faire prospérer l’empire immobilier construit par son père, descendant d’un émigré russe.
Malgré son argent et un orgueil démesuré, Jay est un type plutôt bien, soutien d’Obama, sensible à la condition des Afro-Américains auxquels il distribue de l’argent via sa fondation. Il a également la fibre écolo. Pondéré, jamais un mot plus haut que l’autre, il est l’incarnation de la maîtrise de soi, du politiquement correct et arbore bien évidemment tous les signes extérieurs de la richesse : une magnifique propriété, une seconde épouse ravissante, intelligente et beaucoup plus jeune que lui et, son péché mignon, une équipe de basket.
Quelques gros grains de sable vont venir fragiliser cet équilibre. Son associé et cousin détourne l’argent de l’entreprise, sa fille, en rébellion contre son père, couche avec une Noire adepte du postcolonialisme, son joueur star fait des caprices, son épouse veut un enfant (ce qui n’était pas prévu dans le contrat de mariage !), une procureure ambitieuse et cynique fait du zèle… Bref, rien ne va plus au royaume de Jay Gladstone. Et la descente aux enfers est inéluctable. Celui qui a été encensé, le plus souvent par intérêt, est désormais traîné dans la boue.
Mené tambour battant, « Mécanique de la chute » souligne les travers de la société américaine : culte de l’argent, collusion entre les politiques et les patrons, racisme, bien-pensance, hypercommunication et, surtout, accentuation des communautarismes, victimisation des minorités qui revendiquent le monopole de la souffrance, réseaux sociaux qui recherchent des boucs émissaires responsables de tous leurs maux…
Alors que le cartésien Jay tente de rester droit dans ses bottes, le monde autour de lui sombre dans l’irrationnel et l’émotion. Chacun prétend détenir sa vérité en détruisant toute possibilité de dialogue avec celui qui n’est pas d’accord. C’est à la fois drôle et effrayant pour l’avenir.
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